Replay : « Mets tes bottes et ta charlotte n°3 »
Retour à la listeMets tes bottes et ta charlotte n°3 – Retour sur la visite au Pays d’Epinal
Mercredi 28 juin, une vingtaine d’acteurs de l’alimentation durable à participer à la visite de deux initiatives portées sur le territoire du Projet Alimentaire Territorial du Pays d’Épinal.
Le fil rouge de la journée visait à amorcer notre réflexion sur l’installation de jeunes agriculteurs, ainsi que les leviers à disposition des collectivités pour inviter à des activités agricoles par des tiers, ou les mener en régie lorsque nécessaire. Premier temps d’une série qui comprendra notamment la visite de l’espace-test agricole de Metz-Frescaty.
Retrouvez un résumé de la journée en vidéo ci-dessous et par la suite un déroulé plus détaillé.
La journée a débuté par le mot d’ouverture de Patrick NARDIN, Maire d’Épinal, qui a tenu un discours volontariste sur la fourniture de la restauration collective en produits de proximité et de qualité, ainsi que sur le rôle moteur des collectivités sur le sujet. La Régie Maraichère d’Épinal est directement inspirée de l’exemple de Mouans – Sartoux avec laquelle Épinal est en réseau au sein d’un « interPAT » (le réseau PARTAAGE s’en fait le relai dans cet article).
Mot d’introduction de Patrick NARDIN, Maire d’Épinal
Vous pouvez retrouver l’intégralité de son mot d’introduction, ci-dessous :
La démarche du PAT du Pays d’Épinal, cœur des Vosges
Après un temps de tour de table, où chacun a pu rapidement présenter sa structure et ses attentes quant à la journée, Sylvie D’ALGUERRE – Conseillère régionale et Vice Présidente du PETR, en charge du projet de territoire, promotion du territoire et développement durable – a pu présenter la démarche du Projet Alimentaire Territorial engagée depuis un an et demi.
Presentation-28_06_PAT-PETR-Epinal-Coeur-des-Vosges.pdf
Madame D’ALGUERRE a souligné à plusieurs reprises à quel point la volonté politique était importante pour engager une telle démarche « tout en ayant à l’esprit que l’on doit toucher l’ensemble de la population, qui est diverse ».
Suite à la présentation du PAT et des axes qui semblent se dessiner à l’issue du diagnostic, se sont engagés des échanges dont nous pouvons retenir :
- le témoignage de la légumerie de Xertigny qui, si elle a été ralentie par la Covid, n’a pas de soucis de sourcing grâce à son approvisionnement auprès de 8 producteurs, mais en revanche elle manque de clients et de débouchés. Elle travaille ainsi sur 18 cantines de collèges, mais le prix est un frein évoqué par de nombreux acteurs qu’elle a pu démarcher.
- Le PAT de Forbach, a pu faire part de son accompagnement par la Chambre d’agriculture sur la fourniture en produits de proximité, mais témoigne également de difficultés lorsque la question du prix a été soulevée.
- Les personnes présentes ont pu indiquer qu’à leur sens la lutte contre le gaspillage peut donner des marges de manœuvres.
- Toutefois cela nécessite de changer les pratiques dans les cantines, ce qui n’est pas sans difficultés (RH, formation, bonne volonté des personnes…). Là dessus, le programme « Plaisir à la Cantine » a été cité comme un moyen d’embarquer et convaincre les équipes de restauration collective.
- Le webinaire du programme « Lait et Fruits à l’école » a été abordé, comme une piste pour permettre de financer le bio et certains AOP / AOC dans les écoles.
Régie Maraichère et « espace-test » : les projets de la Ville d’Épinal
Julie SCHERRER, responsable projets « Ville éducative et sportive » à la Ville d’Épinal a pu présenter plus en détail les projets engagés par la commune qui visent à réfléchir et expérimenter la reprise en main de la restauration collective et de ses approvisionnements. Pour ce faire, Épinal a dédié un peu moins d’un hectare à la culture maraichère de plein champs afin d’approvisionner deux sites de restauration pilotes : le centre d’accueil « 40 semaine » et la résidence autonomie municipale.
Il s’agit d’expérimenter à petite échelle pour envisager la suite du contrat de restauration collective, renouvelé cette même semaine pour 2 ans (contre 8 ans auparavant).
Projet-Alimentaire-Territorial_PARTAAGE_28-juin-2022_Epinal.pdf
En parallèle de cette régie maraichère et reprise en propre de la restauration collective, il est réfléchi de dédier un espace à l’installation de jeunes agriculteurs pour tester leurs activités.
Marie-Pierre FERRARI de l’Eurométropole de Metz et Nicolas HENRY de Cap Entreprendre et du réseau RENETA, portant l’espace-test agricole de Metz Frescaty, ont pu partager leur retour d’expérience sur ce sujet, ainsi qu’inviter les membres du réseau à une visite pour l’automne 2022.
Des échanges qui ont suivi, il est ressorti :
- Que selon les retours d’expériences, bien souvent, les maraichers ne sont pas intéressés par les volumes et tarifs de la Restauration Hors Domicile. De même les produits beaucoup consommés en restauration collectives ne sont pas les plus rémunérateurs (pommes de terres, carottes…) . Leurs modèles économiques reposent davantage sur de la vente directe aux particuliers et d’autres circuits de distributions, plus flexibles et rémunérateurs. D’où une difficulté pour la restauration collective de se fournir en produits de proximité.
- En plus de la régie maraichère, une piste de sourcing serait d’inviter des agriculteurs en polyculture élevage à se tourner vers une diversification en légumes de pleins champs, via des contrats d’engagement avec eux.
En images – Régie maraichère et repas à la « 40 semaine »
Focus sur le nouveau bâtiment de la Chambre d’agriculture des Vosges
Accueillis le matin dans les locaux de la Chambre d’Agriculture des Vosges, impossible de passer à côté de l’occasion de revenir sur la démarche de ce nouveau bâtiment : un investissement de 5 millions d’euros, partagé entre ONF, SAFER et Chambre d’Agriculture, dans un bâtiment en ossature bois issu à 100% de la région pour développer là aussi une filière de proximité et de qualité 🌲🪓🌲
Visite de la Ferme Aquaponique de l’Abbaye
Après le déjeuner et un trajet à vélo pour une partie des participants, nous nous sommes retrouvés pour visiter la Ferme Aquaponique de l’Abbaye, une des deux seules fermes du genre de la région.
Noémie CHARPENTIER nous a fait part de son parcours dans l’industrie pendant 10 ans, avant de vouloir reprendre en 2019 l’exploitation de ses grands parents, « à l’abandon » depuis 15 ans. Pour cela, elle a transformé l’ancienne étable en serre aquaponique. Exit la tôle et les parpaings : toits et parois sont devenus transparents et le sol en béton accueille désormais des bassins dans lesquels s’égayent plusieurs espèces de poissons qui aident à fertiliser et faire pousser en hors-sol de nombreuses variétés de fruits et légumes.
🐟 Des écailles 🐟…
Les poissons sont à la base du circuit fermé de la ferme. Ce sont eux qui par leur déjections amorcent le cycle de l’azote qui aboutira à fertiliser les plantes.
Ce sont ainsi pas moins de XX kg de poissons qui sont élevés dans les bassins de la ferme : poissons rouges, carpes, tanches, ils sont destinés à fournir respectivement les bassins d’agrément, servir de vifs pour la pêche, alimenter les restaurants locaux, ou encore fournir les étangs ou piscicultures voisines…
La démarche de Noémie CHARPENTIER est originale car elle vise à pousser au maximum l’autonomie de son exploitation, ainsi l’alimentation des poissons se compose :
- des racines et jeunes feuilles des plants de l’exploitation, qui après récoltes ne sont pas utiles à la consommation humaine
- de protéines végétales, fournies par des lentilles germées d’un agriculteurs voisin
- de protéines animales d’insectes qu’elle doit pour le moment acheter. Mais elle expérimente afin de produire elle-même les insectes (mouches, vers…).
🌱 jusqu’aux racines 🌱
L’eau des bassins à poissons est constamment mise en mouvement afin de passer ensuite dans de grandes cuves où bactéries et oxygène transforment les nitrites en nitrates, assimilables par les plantes.
Un modèle durable et viable ?
Interrogée sur le sujet, Noémie a pu exprimer que pour elle ce modèle d’exploitation a de l’avenir (c’est d’ailleurs l’adresse de son site : « l’avenir est dans l’assiette« ) à plusieurs égards :
- En terme économique : s’il nécessite un investissement matériel important (~200 000 €), il est relativement simple à maintenir et peu couteux en main d’œuvre :
- économie de 90% d’eau par rapport à une exploitation maraichère classique
- pas de travail de désherbage, ni de coût en engrais
- le temps de travail et de main d’œuvre est limité à l’entretien du système, à nourrir les poissons, au traitement des éventuelles pannes, à l’observation et à la cueillette.
- En terme de confort et d’attrait de la profession : l’ensemble des opérations se font en station debout, c’est un confort de travail que n’ont pas les exploitations maraichères classiques
- En terme de qualité environnementale : si le hors-sol ne peut pas prétendre à la labellisation bio, la régulation des insectes et des parasites se fait en production « intégrée ». L’ensemble du système est optimisé pour produire le plus possible, sur une surface réduite et à partir du moins de ressources extérieures possibles. Elle vise donc à avoir un impact sur l’environnement réduit à son minimum.
- En terme de foncier : la production hors-sol peut s’envisager sur tout type d’espaces et prioritairement sur des espaces artificialisés ou peu propices à l’agriculture classique : qu’il s’agisse de friches urbaines, ou d’anciens hangars agricoles, ce peut-être un moyen de rendre productifs des espaces inutilisés.